Dose capée, dose ajustée, pleine dose : Que faire pour l’utilisation des anticancéreux chez les patients obèses ?

Introduction
Depuis la fin du siècle dernier, l’augmentation croissante de l’obésité dans le monde est assimilable à une pandémie. Les oncologues, de plus en plus confrontés à ce profil de patients, font face au problème du dosage des anticancéreux. L’adaptation de ces médicaments se fait souvent de façon empirique et diffère entre les établissements. Le but de ce travail est de clarifier les raisons pharmacocinétiques qui justifient le recours ou non à un ajustement de dose ou à une dose capée d’anticancéreux dans le service d’hématologie de notre hôpital.

Matériels & Méthodes
Des recherches bibliographiques ont été réalisées avec les termes MeSH « obese », « cancer drugs » ou « pharmacokinetic ». Nous avons synthétisé ces résultats pour proposer une approche et des recommandations de prise en charge de ces patients dans notre hôpital. Ces recommandations se sont principalement basées sur 7 publications, associées à des revues et des publications plus générales portant sur les modifications pharmacocinétiques engendrées par l’obésité.

Résultats
Etant donné la nature hydrophile de la plupart des cytotoxiques, le volume de distribution de ces drogues n’augmente pas proportionnellement avec la surcharge pondérale des patients obèses. En effet, l’obésité se caractérise par une augmentation du tissu adipeux dont la part hydrophile est plus faible que celle du tissue maigre ce qui réduit le volume de distribution de ces molécules. Ceci suggère que les doses d’anticancéreux ne doivent pas être calculées selon le poids total du patient.
La plupart des anticancéreux sont prescrits en fonction de la surface corporelle et non du poids total. Le poids ayant peu d’impact sur la surface corporelle, il a peu d’influence sur ces doses d’anticancéreux. Par ailleurs, ces molécules sont censées être au seuil de toxicité tolérable par le patient, les doses doivent donc surtout être adaptées aux toxicités et aux comorbidités du patient, notamment sur les capacités d’élimination. Cependant, certaines molécules utilisées dans les conditionnements de greffes de cellules souches hématopoïétiques, dont la posologie est basée sur le poids, nécessitent une adaptation de la dose chez ces patients qui peut conduire à des concessions importantes.
Depuis début 2022, nous sommes intervenus sur 6 prescriptions de patients obèses pour réduire leurs doses : 3 de busulfan (-20%, -27% et -43%), une de thiothépa (-20%), 2 de cyclophosphamide (-16% et -25%).

Discussion-Conclusion
Suite à plusieurs cas de patients obèses, ce travail a permis de considérer ces patients comme une population à risque dans les services d’oncologie au même titre que les patients âgés ou atteints d’insuffisance rénale ou hépatique. Désormais, le service d’hématologie nous contacte lorsqu’il doit initier un protocole de chimiothérapie chez un patient obèse pour évaluer au préalable le risque pharmacocinétique et les adaptations nécessaires.

Voir le poster