Theranostic et radiopharmacie : exemple technique de la prise en charge des tumeurs neuro-endocrines (Gallium-68 ; Lutétium 177)

4 octobre 2019

F. Debordeaux Service de médecine nucléaire, CHU Bordeaux


Theranostic et médecine nucléaire sont de « vieux » partenaires. L’approche théranostique conduit à envisager une prise en charge personnalisée des patients. L’imagerie moléculaire isotopique est alors un examen de choix pour la sélection de patients potentiellement répondeurs aux thérapies par la mise en évidence de la cible thérapeutique. Cette imagerie fonctionnelle permet aussi de déterminer la dose optimale de médicament à administrer au patient ou encore d’assurer son suivi thérapeutique. Un autre objectif consiste à pouvoir prédire, puis identifier la réponse clinique (survie globale, survie sans récidive, etc…). La TEP au 18F-FDG (fluorodésoxyglucose) est ainsi par exemple un élément pronostique reconnu de l’efficacité des chimiothérapies classiques mais aussi des thérapies ciblées. De plus, l’étude de la pharmacocinétique conduit à identifier des populations particulières de patients pour lesquelles la posologie doit être adaptée et peut aussi aider à mieux comprendre les résistances à certains traitements. Il s’agit là encore d’un standard diagnostique et thérapeutique en médecine nucléaire, avec notamment l’exemple de pathologies bénignes ou malignes de la thyroïde. La fixation de l’iode-123 sur une scintigraphie diagnostique ou de l’iode-131 en post-thérapeutique est un gage de l’efficacité thérapeutique.
La radiothérapie interne vectorisée (RIV) aux analogues de la somatostatine lutétiés bénéficie de la même façon de cette approche théranostique pour la prise en charge de tumeurs neuro-endocrines (TNE). Une pré-évaluation diagnostique à l’aide d’analogues de la somatostatine radiomarqués au gallium-68 confirme la présence de la cible thérapeutique, et témoigne de la captation tumorale.
Les TNE sont des tumeurs rares et hétérogènes, au potentiel évolutif variable, qui bien différenciées, surexpriment les récepteurs de la somatostatine. La lutathérapie associe un agoniste des récepteurs de la somatostatine à un radionucléide thérapeutique le lutétium-177. Ce radionucléide se caractérise par une émission béta moins thérapeutique, mais aussi une émission gamma ouvrant la porte à une imagerie TEMP (tomographie par émission monophotonique) de contrôle post-thérapeutique.
L’étude internationale multicentrique NETTER-1 a conduit à l’essor de la lutathérapie en France. Cette étude de phase III randomisée et contrôlée a évalué l’efficacité anti-tumorale du 177Lu-DOTA0-Tyr3-octréotate (ou ®Lu-DOTATATE, Lutathera®) associé aux analogues de la somatostatine 30 mg LP par rapport à la Sandostatine® LAR (Octréotide) 60 mg chez des patients avec une TNE digestive bien différenciée de l’intestin moyen, de grade 1 ou 2, progressive et surexprimant les récepteurs de la somatostatine. L’étude a montré une diminution du risque de progression de la maladie de 79% (médiane de PFS non atteinte et estimée à 28.4 mois versus 8.5 pour le groupe comparateur lors de l’analyse intermédiaire). Le traitement permet également une nette amélioration de la qualité de vie décrite par les patients.
La mise en œuvre pratique de ces traitements a évolué du stade de la recherche clinique à celui actuel de l’autorisation de mise sur le marché (AMM). Ce médicament commercialisé dans un seul format de dose peut nécessiter des ajustements posologiques. L’utilisation de système automatisé conduit à diminuer l’exposition du personnel lors de ces étapes très irradiantes de préparation des doses à administrer (PDA). Les modalités d’administration du médicament ont également été optimisées afin de réduire au maximum l’exposition du personnel médical et paramédical intervenant lors de cette étape.
Sur le plan diagnostic, l’imagerie TEP (Tomographie par Emission de Positons) repose sur l’administration d’analogues de la somatostatine marqués au 68Ga. Compte tenu de la décroissance radioactive beaucoup plus rapide des radionucléides utilisés, il est nécessaire de réaliser des préparations extemporanées. De la même façon que pour la thérapie, l’évolution du cadre de la recherche clinique vers la routine des services s’est accompagnée d’une simplification des conditions de radiomarquage, initialement proches des conditions de fabrication industrielle. Ces préparations même simplifiées font intervenir des radionucléides de haute énergie ce qui pousse à privilégier des techniques les plus automatisées possibles que ce soit pour la préparation comme pour la réalisation des doses patients.
La thérapie en médecine nucléaire connaît ainsi une nouvelle dynamique. Les indications de la lutathérapie vont vraisemblablement s’étendre. L’identification de nouvelles cibles moléculaires est susceptible de conduire à la prise en charge théranostique isotopique de nombreuses autres pathologies cancéreuses.

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